Vidéo de la chanson enfantine du tracteur Paroles de la chanson du tracteur Un tracteur, ça monte et ça descend et ça tourne, et ça tourne Un tracteur, ça monte et ça descend et ça tourne dans les champs et ça fait beaucoup de bruit brrr brrr brrr brrr brrr brrr …. il faut mimer tenir le volant puis monter, descendre les champs, tourner droite et gauche puis sauter sur place au moment du bruitage du moteur ! un vélo, ça monte et ça descend et ça tourne dans les champs un vélo, ça monte et ça descend et ça tourne dans les champs mais ça ne fait pas beaucoup de bruit diling, diling, diling tracteur Navigation de l’articleParceque je suis plate, moi, assis sur mon patio, dit-il en souriant. Au bout de dix ou quinze minutes, le monument, là , t’en as fait le tour C’est pour s’assurer que les gens ne s
Quand je redescends dans le bourg, vendredi matin, malgré une pluie fine et glacée, il y a du monde partout. Devant l’épicerie, la boulangerie, la coiffeuse, la pharmacie, la mairie. Je suis étonnée de ce que je suis sur le point de nommer, en comparaison à la veille, ébullition. Les voitures sont garées des deux côtés de la rue du Commerce, celle qui traverse la commune. Maggie Everton, une Écossaise qui habite en face de la boulangerie, me dit qu’il y a assurément plus d’animation que d’habitude. Est-ce comme partout en France, ce 13 mars 2020, où les citoyens, sentant arriver le confinement, se préparent en se précipitant dans les commerces ? Je n’arrive pas à imaginer cela, pas encore. J’ai peu dormi, travaillée par un drôle de sentiment – entre malaise et inquiétude – né de la conversation au dîner avec les trois dames anglaises et surtout par cette phrase que Wendy m’a dite, En Espagne pour les vacances, en Angleterre pour le travail et en France pour la retraite. » Cette liberté d’aller où le cœur dit me semble être un des plus grands privilèges de nos jours. Cette migration qui n’est pas provoquée par la nécessité la faim, la guerre, les conditions climatiques est réservée aux peuples du premier monde, à ceux qui disposent d’un bon » passeport et qui voient ainsi les notions de frontière quasiment m’offre un café et des viennoiseries. Chez elle, il y a un accordéon posé sur la table et devant les fenêtres qui donnent à voir la rue principale, elle a composé des plates-bandes de plantes grasses entourées de galets blancs. Après une carrière en Écosse comme ergothérapeute, elle a cherché une maison à acheter en France, un endroit où elle pourrait respirer, jardiner. Elle ne connaissait la Creuse qu’à travers un reportage citant la région comme l’un des endroits dans l’Hexagone où l’immobilier est le moins cher. C’est ici, en plein milieu du bourg, qu’elle a trouvé. J’adore être ici ! Tout le monde a été très gentil. Parfois on se moque gentiment de mon accent ou quand je me trompe. Quand j’ai dit à la coiffeuse que je voulais me couper les chevaux par exemple, ça a fait beaucoup rire. » Son envie d’être utile la pousse à devenir conseillère municipale en 2014. C’était un honneur d’être élue, j’ai pensé que Saint-Sébastien démontrait une véritable ouverture d’esprit en votant pour une femme et qui plus est, une étrangère ! J’ai appris plein de choses, j’ai pu faire le lien avec la communauté anglaise, je suis bénévole à la bibliothèque, j’anime les cours de gym, je traduis parfois des textes pour la mairie… » Elle aurait peut-être remis ça cette année s’il n’y avait eu le Brexit. J’ai reçu un coup sur la tête en janvier avec ce vote insensé, j’ai eu du mal à m’en remettre. Mon pays pourtant, l’Écosse, a voté contre ce Brexit. Maintenant je n’ai plus le droit de me présenter ici, plus le droit de voter à Saint-Sébastien et bientôt, je n’aurai même plus le droit de voter en Écosse puisque j’aurai passé trop de temps ici ! » Les Écossais qui vivent à l’étranger perdent, en effet, leur droit de vote après quinze ans. Est-ce qu’elle pense à rentrer, à vendre sa petite maison qu’elle aime tant ? Elle secoue la tête rapidement en fixant son accordéon. Pas maintenant. Vous savez je n’ai rien fui. J’ai quitté un beau pays. J’ai simplement choisi de vivre ici. »Dans l’odeur de pain frais qui flotte dans l’air, je vais revoir Madeleine Cogne, une figure de Saint-Sébastien. La veille, Florence Bel du bar-musée de la Résistance me l’avait présentée comme la garante de la mémoire du village et, aussi, comme la femme qui avait tenu le troquet de la commune pendant plus de vingt ans. Cette dame de 90 ans m’avait montré le bahut de son salon derrière lequel il y a une ouverture pour accéder directement à l’établissement tenu désormais par le couple franco-anglais. J’avais échangé quelques mots avec elle, sur le pas de sa porte, et promis de revenir le lendemain. Je me dis qu’elle a sûrement oublié, mais elle m’attend quand je frappe à sa porte vitrée. Elle porte une blouse bleue à petites fleurs jaunes, boite un peu à cause d’une mauvaise blessure causée par une bûche. Madeleine vit seule dans cette maison achetée en 1975 et qui est impeccablement tenue, bien agréablement chauffée par la cheminée. J’enlève manteau, bonnet, écharpe et décline poliment le café. Mon mari est mort le 3 mai 1998, à 74 ans. » C’est une des premières phrases qu’elle me dit, en levant le menton et en fermant les yeux quand elle annonce haut et fort la date et l’âge. Elle le dit pour elle, elle le dit pour moi, et il me semble qu’elle le dit aussi à toutes ces choses qui nous entourent – le Caddie en osier monté sur roues où sont entassées des bûches, la télévision éteinte, le napperon à dentelles sur la table basse, les vieux livres sur l’étagère, le téléphone dont le fil s’est entortillé, les voilages aux fenêtres, la vaisselle dans le bahut. Cette date est celle qui marque l’avant et l’après. Je cherche quelque chose à dire mais à part mon émotion que je garde pour moi, je n’ai rien à offrir à part me tenir en silence quelques instants avec elle. Le bois crépite, dehors les voitures passent. Je me souviens de cette phrase de Perec Il leur semblerait parfois qu’une vie entière pourrait harmonieusement s’écouler entre ces murs couverts de livres, entre ces objets si parfaitement domestiqués qu’ils auraient fini par les croire de tout temps créés à leur unique usage, entre ces choses belles et simples, douces, lumineuses. » Madeleine me demande de lui donner le contenu d’un sac en plastique posé sur la table. J’en sors de vieilles photos sous cadre de Saint-Sébastien, probablement datées de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe, qu’elle place devant elle. Une à une, elle me les présente et m’interroge dans un jeu qui pourrait s’intituler devine où c’est ». Ici, l’emplacement du restaurant, là celui de sa maison, ici encore l’entrée du bourg. Plusieurs montrent la rue principale, appelée parfois la Grand-Rue, parfois la rue de la Gare. Elle semble plus large qu’aujourd’hui mais est reconnaissable à l’envolée des marches en pierre devant le relais de poste et à un grand arbre dont le feuillage épais semble enlacer une maison juste avant l’église. Voici une photo piège, prise sous un nouvel angle, mais c’est mal me connaître, Madeleine. Je ne me laisse pas berner – c’est encore la rue principale. Sur tous les clichés, les femmes sont habillées de sombre, les robes et les jupes sont longues, les cous cachés par des hauts cols. Les hommes ont des traits taillés à la serpe et regardent l’objectif par en dessous. Les enfants sourient timidement. J’aurais fait un sans-faute si ce n’est la photo de l’étang. Au premier plan, un jeune garçon semble jouer à taper dans l’eau avec une branche ; à gauche, trois vaches entrent dans l’étang, poussées par une femme tenant un bâton ; deux autres femmes un peu plus loin regardent les bovins, et au milieu de l’eau, il y a des canards. À l’arrière-plan, des maisons dont une qui tombe en ruine. Je cherche en vain des indices et finis par donner ma langue au chat. Madeleine m’apprend, la mine réjouie, que cette mare se trouvait à l’entrée de Saint-Sébastien, à l’endroit même de la grande place asphaltée où j’ai tourné en rond la veille. J’ai encore la parole bien faite, hein ! » rigole-t-elle avec son accent creusois qui fait rouler les elle me raconte les anecdotes sur le cantonnier, sur le garagiste, sur les personnalités » de la commune, je n’ai aucune peine à imaginer la femme à poigne qu’elle était tandis qu’elle tenait le troquet de Saint-Sébastien. Plus de vingt ans derrière le comptoir, sans compter ses heures. L’ouverture entre la maison et l’établissement lui permettait, entre les services, de s’occuper du foyer et des enfants. Son mari, ambulancier, lui donne un coup de main de temps en temps. Madeleine raconte sans se faire prier, la parole bien faite encore, comme elle dit. Ce sont les histoires d’avant et comme souvent, cet avant-là , du temps de la jeunesse, des jambes vigoureuses, des esprits vifs, des cœurs vaillants et des amis nombreux, c’était mieux. Il y avait du monde avant, ici. Beaucoup de passage. Parfois, j’étais obligée de servir le café dans mon salon tellement c’était bondé. Les jours de foire, je me levais à 2 heures du matin et à 3 heures, je servais le café et parfois, eh oui, le pousse-café. Avec la gare, les marchands de cochons arrivaient de partout. Il y avait deux restaurants dans le bourg, trois dans le quartier de la gare, mais ça m’arrivait de faire une grande omelette au jambon pour l’équipe de foot. Ils aimaient ça, l’omelette de la Madeleine ! » J’aurais aimé que par la magie des phrases et leur pouvoir d’évocation, le rire clair et l’accent rond de Madeleine éclatent entre ces lignes. Elle a baissé le rideau en 1996 et vu avec regret quelques repreneurs abandonner bien vite. Jusqu’à la réouverture en janvier dernier. Je suis contente que ça rouvre. Mais Saint-Sébastien a bien changé. Les jeunes sont partis, seuls les parents sont restés. Parfois on croise des gens qu’on ne connaît pas. Il y a aussi des Anglais, vous les avez rencontrés ? Ils rachètent des ruines et les retapent, ça c’est bien… »C’est la morne saison à Saint-Sébastien. Une pluie fine tombe, et il n’y a plus personne dans les rues. J’essaie de deviner sans succès l’emplacement du grand arbre qu’on voyait sur les photos. Au restaurant de Florence et de Quentin à côté, je commande une soupe. Je suis frigorifiée, je crois que j’ai attrapé froid. Un couple attend son déjeuner en sirotant un verre de rouge. Un jeune homme est accoudé au bar, finissant son café. Il a gardé son écharpe et soudain, se met à tousser. Je n’ai pas le virus, lance-t-il à la cantonade en levant les deux mains dans un geste d’excuse. Juste une mauvaise bronchite depuis une semaine. » Je pense déjà à mes prochains séjours ici – j’en ai prévu un début avril et un autre mi-mai – n’imaginant pas une seconde que tous ces plans seront à l’eau. J’espère voir d’autres facettes, d’autres complexités, d’autres réalités de la commune, mais je voudrais aussi voir cette campagne à d’autres saisons. Je reprends ma voiture pour rentrer chez moi. Avant la nationale et les camions en file indienne, il y a une promesse dans ces champs glacés et mouillés, dans ce paysage mordu par l’hiver. C’est quelque chose qui attend de surgir, une lumière, une couleur, un bruit et, comme les peintres, je rêve de pouvoir l’ je suis à nouveau sur la grande place asphaltée qui était, avant, une mare pour les animaux, deux mois et demi se sont écoulés. J’ai l’impression que non seulement j’ai vu cette commune pendant l’hiver mais également à une autre époque, avant le Covid-19, quand il n’y avait pas le décompte des morts chaque jour assénés comme autant de coups à notre sentiment de chemin, j’ai remarqué que la moisson avait commencé, certains champs étaient parsemés de balles de foin. Sur les petites routes de campagne, j’ai croisé différents véhicules agricoles ». J’utilise cette expression générale parce que je ne sais qu’identifier les tracteurs et les moissonneuses-batteuses et j’ai avancé lentement derrière bien d’autres machines à dents, à piques, avec des échelles rétractables et des roues plus hautes que ma voiture. Devant la maison avec le vieux logo ELF sont alignées désormais quatre chaises couleur vert d’eau. J’imagine que le soir venu, ces chaises couleur eaux limpides accueillent ceux qui aiment discuter en prenant l’air du soir. J’attends Annie Bourgoin, première adjointe de la mairie de Saint-Sébastien élue dès le premier tour, qui m’a donné la permission d’assister à la commémoration de l’embuscade de Vaussujean, survenue au lieu-dit éponyme, pas loin de la gare. J’ai promis de me faire petite parce que cette année, avec les restrictions sanitaires, la manifestation ne peut accueillir qu’un public restreint – Quinze grand max », m’a-t-elle dit. Annie Bourgoin porte un tee-shirt rouge à message, Les femmes font l’histoire », et elle me raconte qu’en temps normal », cette commémoration accueille bien du monde. Il y a un orchestre de cuivres, les enfants de l’école préparent une chanson ou disent un poème, les habitants de Saint-Sébastien sont là , les anciens combattants aussi. » Pour la commune, c’est LE grand rendez-vous annuel de la mémoire. Le 28 mai 1944, une embuscade tendue par un détachement du 1er régiment de France à un groupe de maquisards rentrant de la réception d’un parachutage d’armes dans l’Indre entraîne la mort de sept résistants. Ils s’appelaient Henri Alix, Jean Pierre Bajolet, André Barrat, Modeste Clotet, Martin Gonzales-Fuentes, Paul Lecuit, Roger Armand Maury. Trois autres sont blessés, deux sont faits prisonniers et plusieurs s’évadent. Apprenant cela, Victor Renaud, un résistant habitant Saint-Sébastien, vient se plaindre au chef de poste. Dans un livre auto-édité intitulé Pour mon père Victor Renaud, héros et martyr de la Résistance, son fils François Renaud, raconte Ce jour-là , apprenant que des Français avaient tué des Français à Vaussujean, il fut blessé au plus profond de son être et, n’écoutant que son cœur, il se rendit sur les lieux de la tuerie et cria à la face des responsables du 1er régiment de France tout le mépris qu’il avait pour eux. … Bien entendu, ceux-ci l’arrêtèrent et furent heureux de le remettre à la milice de Vichy. Ce fut sa dernière action d’homme libre. » Victor Renaud est détenu et torturé à la prison de Limoges. Il est exécuté le 23 juin la stèle érigée à Vaussujean, nous sommes quinze. Quatre anciens combattants portent le drapeau tricolore, le maire qui ne se représente pas mais qui est encore en exercice jusqu’au second tour, quelques adjoints, le président de l’Association nationale des anciens combattants de la Résistance Anacr, des techniciens pour le micro et les haut-parleurs… Sous un ciel très bleu, il y a deux discours brefs, le dépôt de gerbes, la lecture des noms des morts pour la France, La Marseillaise et Le Chant des partisans. Le petit cortège remonte ensuite la rue sur quelques centaines de mètres pour déposer une autre gerbe devant le monument à la mémoire de Victor Renaud. Je suppose, comme l’évoquait Annie, que les cérémonies des années précédentes avaient plus de panache, que la présence active des enfants de l’école élémentaire de Saint-Sébastien donnait un sens au mot transmission et la foule rendant hommage aux morts faisait espérer que ce drame ne serait jamais il y a, en cette fin de matinée, entre les discours et les chants, un silence qu’aucune voix n’ose briser – je ne sais si c’est le mètre de distanciation ou le port du masque ou simplement l’émotion d’être là , dans ces conditions si particulières. Dans ce silence, j’entends les vocalises d’un oiseau au-dessus de la stèle, l’herbe qui crisse et tremble au passage d’un lézard vert sous la haie derrière moi, le vent dans les arbres. Je pense aux morts et je me demande si ce sont des choses que l’on peut serrer contre son cœur quand le corps est à terre et que vient la fin un oiseau qui chante au-dessus de soi, la caresse d’une feuille contre son visage.
Deuxaprès la mort tragique de Morgane Rolland, renversée par un tracteur sur une route de campagne, le procès s'apprête à s'ouvrir. Trois ans de prison ont été requis à l'encontre du